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Marion V
Récemment recrutée chargée de recherche Inserm à l’Institut de la Vision, Shahad Albadri travaille la signalisation Redox et son rôle dans la différenciation des cellules souches de la rétine. Pour cela, elle étudie aussi bien les gènes que les modifications protéiques et lipidiques impliqués dans ce processus.
Shahad Albadri, CR Inserm. Département de biologie du développement, Institut de la Vision. © Marion Rosello
Pour Shahad Albadri, la curiosité pour le vivant est née lorsqu’elle était toute petite fille. « J’étais émerveillée qu’une cellule puisse être si parfaite en étant si petite. Et je voulais comprendre comment tout ça se mettait en place et fonctionnait ». Ses parents, tous deux chimistes de formation, l’encouragent dans cette voix, ainsi que nombre de ses professeurs, qui lui transmettent leur passion. Après une licence en Microbiologie à l’université de Caen, alors la plus proche du domicile familial, elle décide de poursuivre par un Master spécialisé en biologie du développement et génétique à l’université de Rennes. Elle fait également ses premières expériences en laboratoire au sein du laboratoire du Dr Véronique David (Institut de Génétique & Développement de Rennes IGDR UMR 6290 CNRS - UR1). Elle s’intéresse au développement de l’embryon de poulet et à la mise en place du clivage entre les deux hémisphères cérébraux dans le contexte de l’étude d’une malformation cérébrale complexe, l’holoprosencéphalie. Une première expérience à l’international, à l’université de Cambridge (laboratoire de Sir David Glover, Department of Genetics - University of Cambridge), lui permet de toucher au modèle animal de la mouche, la Drosophile, et aux enjeux de microscopie pour l’étude de la division cellulaire.
La rétine tapisse le fond de l'œil.
C’est lors de sa thèse, en 2009, dans le tout nouveau Centre for Organismal Studies (COS) alors dirigé par le Pr Jochen Wittbrodt à l’université d’Heidelberg, en Allemagne, qu’elle est confrontée pour la première fois à la rétine. Son sujet de thèse s’intéresse en effet à la cascade génétique à l’origine de la mise en place de la diversité cellulaire de la rétine, chez le poisson zèbre. Si la jeune chercheuse peut s’appuyer sur ses connaissances en neuroscience et en microscopie, il y a beaucoup à apprendre : la langue, un nouveau modèle animal, les enjeux spécifiques notamment de ces cellules spécifiques de l’œil des vertébrés que sont les interneurones unipolaires, ou cellules amacrines… Son doctorat en poche, Shahad Albadri choisit de rentrer en France plutôt que de repartir à l’étranger pour son post-doctorat. Ayant développé en fin de thèse une collaboration avec le laboratoire du Dr Filippo Del Bene, alors directeur de recherche au sein du Département de Génétique et Biologie du Développement de l’Institut Curie, elle décide de le rejoindre en 2014 afin de continuer à travailler sur le système visuel du poisson zèbre, consciente de son énorme potentiel comme sujet d’étude. « C’était une immense opportunité car Filippo est un pionnier dans l’usage de nombreux outils génétiques, notamment l’usage des ciseaux moléculaires CRISPR-Cas9 chez le poisson zèbre, que j’ai pu participer à mettre en place », explique la jeune femme, qui souligne combien son directeur de recherche l’a impliquée dans la vie de l’équipe, notamment dans l’encadrement et l’écriture de demandes de financements.« J’ai beaucoup appris et cela m’a mieux armée pour la suite de ma carrière. ».
"Les outils pour étudier la signalisation Redox in vivo dans la rétine n'existaient même pas il y a quelques années !"
Lorsque le Dr Del Bene rejoint l’Institut de la Vision, en 2019 (équipe Développement et fonctionnement du système visuel des vertébrés), Shahad Albadri le suit. Entre temps, au travers du co-encadrement d’une thésarde qui étudiait l’effet de la peroxydation des lipides sur la différenciation des cellules souches de la rétine, elle a commencé à travailler sur les mécanismes d’oxydo-réduction. Elle conduit donc aujourd’hui un projet Inserm qui pousse ces travaux plus loin, et s’intéresse plus largement à l’effet du peroxyde d’hydrogène sur la prolifération et la différenciation cellulaire dans la rétine. Si un de ses axes de recherche se concentre sur le modèle poisson zèbre, elle collabore également avec le Dr Olivier Goureau, chef de l’équipe Développement et régénération de la rétine : apport des cellules souches pluripotentes de l’InVi, sur des modèles de rétine humaine, les organoïdes (voir article "Les organoïdes, supports de thérapie pour la rétine", issu du magazine Le Guide de la Vue n°36). Leur objectif : déterminer si les mécanismes mis en lumière chez le poisson zèbre existent chez l’homme. La chercheuse s’enthousiasme : « Nous ne sommes pas nombreux à travailler sur la signalisation Redox in vivo sur la rétine. Les outils pour ce faire n’existaient même pas il y a quelques années, c’est donc un monde qui s’ouvre à nous. ».
La première mouture de son projet Inserm, Shahad Albadri l’a présentée en 2020. Au cours du temps, celui-ci a gagné en maturité, en complexité, les résultats préliminaires se sont accumulés… et de nouvelles pistes ont même émergé. La jeune chargée de recherche a ainsi notamment co-rédigé avec le Dr Del Bene et le Dr Silvia Fre une demande de financement ANR avec l’Institut Curie pour étudier les mécanismes Redox médiés par le peroxyde d’hydrogène dans les cellules souches de la rétine et de l’intestin. « Ce mécanisme est essentiel à la différenciation et à la prolifération des cellules souches neuronales. Mais est-il spécifique à cette population de cellules ou généralisable à l’ensemble des cellules souches ? » s’interroge la jeune femme avec passion, les yeux pétillants de curiosité.
Propos recueillis par Aline Aurias
Photo en vignette : Shahad Albadri © Juliette Vougny
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